lundi 20 décembre 2010

Picturalité

 nom féminin singulier caractère de ce qui est pictural, de ce qui peut être représenté par la peinture.

pictural, ale

adj. (pi-ktu-ral, ra-l')
  • Qui se rapporte à la peinture. La philosophie de ses philosophes d'estaminet [de la bohème], la puissance picturale de ses soi-disant peintres d'histoire. [Paul Bonnaud, Revue Britannique, sept. 1873, p. 120]
  • Nous soupçonnons fortement l'artiste [Meissonnier] d'avoir toujours eu une prédilection secrète pour ce genre [les batailles], d'ailleurs si intéressant, de sujets picturaux. [E. Bergerat, Journal offic. 7 déc. 1875, p. 10094, 1re col.]
  • Si la composition d'un tableau doit, au point de vue pictural, être agencée selon certains principes traditionnels, le sujet lui-même doit être exprimé d'une façon claire et précise. [Henri Houssaye, Rev. des Deux-Mondes, 15 fév. 1876, p. 878]
  • La France a montré beaucoup de génie inventif, peu de facultés vraiment picturales ; la Hollande n'a rien imaginé, elle a miraculeusement bien peint. [Fromentin, les Maîtres d'autrefois, p. 206] Au pl. masc. Picturaux.


Quelques exemples:

Daniel Arasse : picturalité et photographique.

Cette séance clôt le cycle de séminaires entamé l’année passée sur Daniel Arasse en lien avec le n°3 d’Images Revues.
Elle sera consacrée au regard croisé que l’historien de l’art a posé sur les médiums pictural et photographique. Ayant consacré la majorité de ses écrits à la peinture, Daniel Arasse s’est également intéressé à la photographie. Cette technique, pratiquée par l’historien lui-même, est constitutive d’un regard dont on a souvent souligné l’importance dans sa méthodologie et son travail d’historien. A partir de sa collection de diapositives on verra d’abord l’influence de sa pratique photographique sur le regard qu’il portait sur les œuvres. D’un point de vue plus théorique, ses livres La Guillotine et l’imaginaire de la Terreur et Le Détail révèlent la marque du “photographique” dans des textes qu’il n’a pas directement consacrés à ce médium. En retour, l’importance du “pictural” – son domaine de prédilection – dans ses analyses de photographies sera également soulignée, particulièrement dans ses écrits sur Andres Serrano. Cet aller-retour entre picturalité et photographique est ainsi symptomatique d’une méthode qui, sans jamais oublier la spécificité historique et matérielle de ses objets, parvenait toujours à dépasser les carcans disciplinaires. Une méthode qui a su problématiser les enjeux provoqués par la position de son propre regard - son anachronisme - dans la tentative de « retrouver les questions » posées par une œuvre d’art.



Picturalité,« intuitionnisme » et révélation.

Dans les voies d’abord du diagnostic, l’homœopathie semble montrer une prédilection assez singulière pour la « qualité picturale » du symptôme. Demarque, décrit ainsi :« La technique qualifiée par Kent « d'artistique » sélectionne d'emblée quelques signes généraux considérés comme les plus caractéristiques du malade : un ou deux psychiques, un désir ou une aversion alimentaire marqué‚, quelques modalités générales. A partir de ce « minimum de symptômes de valeur maxima », selon l'expression de Sir John Weir, le choix du médicament de fond s’opère aisément . En pratique, cette technique rend de grands services dans les cas psychosomatiques où l'individualisation du médicament correspondant au type sensible est l’objectif essentiel. ».
C’est Georges Demangeat qui a le mieux résumer, je pense, les avantages, les écueils et les limites de cette voie du diagnostic par la « valorisation picturale » des symptômes :
« Dans la pratique, la difficulté de cette valorisation est accrue par le fait qu'il faut obtenir une symptomatologie valorisée d'un seul individu. Le malade ne s'exprime pas souvent dans le langage de la Matière Médicale, ce qui implique la nécessité d'une interprétation juste ou fausse ; il oublie (d'où obligation d'un interrogatoire précis, fouillé) ; il dissimule consciemment ce qu'il veut dissimuler, la bienveillance et la profondeur de l'interrogatoire homœopathique ne suffisent pas à faire avouer une étiologie honteuse que le malade veut à tout prix dissimuler même si l'on applique soigneusement les recommandations du paragraphe 93. Il cache enfin inconsciemment ce qu'il a refoulé, ce qui nécessiterait pour être mis en évidence un véritable interrogatoire psychanalytique.
Malgré toutes ces difficultés (ce sont là des causes principales d'erreurs), le praticien se trouve dans 1'obligation de prescrire avec ce qu'il possède ; Son bilan du malade, le bilan de ses connaissances en Matière Médicale, le bilan de ses propres interprétations. Il doit prescrire un remède qui doit être la "contre image" exacte de la maladie, sachant que le paragraphe 15 de 1'ORGANON précise ' "Plus la contre - image composée avec le groupe de symptômes pathogénésiques du remède qui parait mériter la préférence renferme de symptômes semblables à ceux caractéristiques, frappants, originaux, inusités et personnels de la maladie naturelle, plus la ressemblance réciproque sera parfaite et plus aussi le remède sera convenable, homœopathique : la spécificité en la circonstance ».
G.Demangeat ajoute encore un peu plus loin que la sélection des symptômes n’est pas seulement une affaire d’addition de symptômes, il faut encore que ces symptômes possèdent entre eux une certaine « cohérence ». Je pense que ce terme de cohérence est effectivement la pierre d’achoppement de l’homœopathie.
Quand nous avons réussi à brosser un " Cézanne ", un " Matisse " ou un " Dali ", nous en sommes tellement fiers que tout notre entourage confraternel en entend parler, et cela est au fond bien naturel. Mais face à la sombre réalité des consultations quotidiennes, face à nous-mêmes, nous sommes bien obligés de constater que nous dessinons et peignons bien souvent des " croûtes " , que la totalité des symptômes n'est qu'un patchwork, et que notre portrait, malgré l'accumulation des touches de couleurs, manque " d'âme " et de vibration.
Dans la juste évaluation de cette sélection symptomatique, à force de ne considérer que l’aspect purement pictural qui détermine certes, dans une certaine mesure, l’individualisation de cette force vitale que le remède doit épauler, nous avons fini par oublier la « sonorité » des symptômes . Il ne suffit pas comme le disait Demangeat d’un certain bon sens, de la connaissance du cœur humain, de la vision de l’homme intérieure, pour combler ce vide de cohérence, encore faut-il posséder les clefs « musicales » de la séméiologie du malade.
Nous connaissons tous aujourd’hui les dérives de cette carence, car ne se contentant pas de ce que la raison et le bon sens ( si particulière à Demangeat et certains de nos maîtres ) pouvaient leur apporter, d’autres ont essayé d’en combler le vide par une recherche au dessous, c’est-à-dire au niveau de l’infra-rationnel. R.Guénon disait à ce propos : « L’intuitionnisme contemporain ( car c’est bien à cela que se réfèrent toutes les nouvelles théories « mystico-psychanalytiques ») rabaisse cette vérité à n’être plus qu’une représentation de la réalité sensible, dans tout ce qu’elle a d’inconsistant et d’incessamment changeant. ».
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Salvador Dali  Inconscient, rêves et images